Un hommage à Jean Hérard Richard (Ritchie)  contesté au Cap-Haïtien  

Statue de Richard Jean Herard (Ritchie) inaugurée par la Mairie du Cap-Haïtien sur la Place KARENAJ. Crédit photo : ET POURQUOI ?

Cap-Haitien – Le samedi 28 décembre 2024, la mairie du Cap-Haïtien, en collaboration avec des fans et admirateurs de Jean Hérard Richard, plus connu sous le nom de Ritchie, a inauguré une statue en hommage à ce pilier de la musique haïtienne. Placée sur la place Karenaj, cette initiative vise à célébrer le parcours exceptionnel du maestro du groupe Klass.  

Cependant, cet hommage suscite des débats enflammés dans les médias et parmi la population. En cause, l’article 7 de la Constitution de 1987, qui interdit formellement le culte de la personnalité. Cet article stipule :  

« Le culte de la Personne est formellement interdit. Les effigies, les noms de personnages vivants ne peuvent figurer sur la monnaie, les timbres, les vignettes. Il en est de même pour les bâtiments publics, les rues et les ouvrages d’art. »

Est-ce la première fois?

La question du respect de cet article constitutionnel avait déjà été soulevée en 2017, lorsque les autorités de Petit-Goâve avaient nommé une bibliothèque en l’honneur de l’écrivain Dany Laferrière, originaire de cette commune. Face à la pression d’un groupe de défenseurs de la loi, le nom de l’académicien avait finalement été retiré de l’établissement.  

Cette fois, c’est le Cap-Haïtien qui est au cœur de la controverse. Pour certains, cet hommage à Ritchie, bien qu’il soit mérité, constitue une violation flagrante de la Constitution. Pour d’autres, c’est une reconnaissance légitime de l’impact culturel de l’artiste.  

Jean Hérard Richard : un parcours exceptionnel

Né le 4 octobre 1969 à Port-au-Prince, Ritchie a grandi au Cap-Haïtien. Premier enfant de sa mère et quatrième de son père, il a effectué ses études primaires chez les Frères de l’Instruction Chrétienne, avant de poursuivre au Collège Notre-Dame et au Lycée Philippe Guerrier. Plus tard, il a étudié la musique et les technologies au Community College aux États-Unis.  

Photo de Ritchie via l’instagram de KLASS, son groupe musical

Une carrière marquée par l’innovation et le succès

Ritchie a découvert sa passion pour la musique dès ses années de lycée, où il a cofondé le groupe Power X. Après avoir émigré aux États-Unis, il a exploré divers styles musicaux en collaborant avec des groupes jamaïcains et américains. Bien que le Compas Direct ne soit pas son genre musical de prédilection à l’origine, il a rapidement gagné en notoriété en produisant pour des groupes haïtiens comme Sweet Micky et Zenglen.  

En 1999, il a officiellement intégré Zenglen, où il a contribué à des projets mémorables tels que Tempo, Easy Compas et Let It Groove. En 2011, il a quitté le groupe pour co-fonder Klass avec des artistes comme El Pozo et Pipo. Sous sa direction, Klass a sorti plusieurs albums à succès, dont Fè l vini avan (2013), Fè l ak tout kè w (2016), et My Pain Killer (2024).  

« Le culte de la Personne est formellement interdit. Les effigies, les noms de personnages vivants ne peuvent figurer sur la monnaie, les timbres, les vignettes. Il en est de même pour les bâtiments publics, les rues et les ouvrages d’art. »

 Article 7 de la Constitution de 1987

Des surnoms révélateurs et une légende fascinante 

Ritchie est surnommé Superstar Maker pour avoir contribué à l’émergence de nombreuses stars de la musique haïtienne, comme Gracia Delva et Gazman Couleur. Il est aussi appelé Monster Maker, car plusieurs artistes qu’il a formés sont devenus ses concurrents. Une légende raconte même qu’il serait né avec une paire de baguettes à la main, symbolisant son destin musical.  

Une reconnaissance légitime, mais une exécution controversée

Si l’impact de Ritchie sur l’industrie musicale haïtienne est incontestable, l’hommage rendu au Cap-Haïtien soulève des questions fondamentales. Est-il possible de concilier une reconnaissance culturelle nécessaire avec le respect des lois en vigueur ?  

Le rôle des autorités municipales dans cette affaire est également remis en question. Sont-elles prêtes à défendre la légalité face à des initiatives populaires, ou laisseront-elles ce phénomène se perpétuer ?  

Le débat reste ouvert, mais on reste certain d’une chose: Jean Hérard Richard, par son talent et sa détermination, continue de marquer l’histoire de la musique haïtienne. 

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