Le 9 septembre 2025, Israël a mené une frappe aérienne à Doha visant plusieurs hauts responsables du Hamas, dont Khalil al-Hayya et Khaled Mashal. L’opération, baptisée Summit of Fire, a causé la mort de six personnes, parmi lesquelles le fils de Khalil al-Hayya et un agent de sécurité qatari. Les dirigeants visés auraient survécu, mais cette attaque constitue une rupture majeure, car elle a touché directement le territoire d’un État du Golfe jusque-là perçu comme médiateur.
Le Qatar a dénoncé une violation flagrante de sa souveraineté, une position immédiatement relayée par l’ONU, l’Union européenne et plusieurs pays arabes, dont l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Les États-Unis, informés à l’avance par Israël, ont exprimé leur désapprobation, qualifiant la frappe d’« infortunée » tout en réaffirmant leur soutien au rôle de médiateur de Doha.
« Une violation flagrante de notre souveraineté » — Gouvernement qatari
Des relations complexes et ambiguës
Les relations entre Israël et le Qatar ont toujours été marquées par une ambiguïté. Si Doha a apporté un soutien financier considérable au Hamas – estimé à plus de 1,8 milliard de dollars en une décennie – l’émirat a également joué un rôle crucial dans plusieurs négociations de cessez-le-feu, notamment lors de l’échange d’otages en 2023.
Mais la confiance entre les deux parties s’est encore fragilisée en 2025 avec le scandale dit du « Qatargate », qui a révélé des soupçons de financement occulte de responsables israéliens par Doha. Cette affaire a nourri la méfiance d’Israël à l’égard de l’émirat, accentuant un climat déjà tendu.
Malgré ces tensions, le Qatar reste un acteur clé dans la diplomatie régionale. Son rôle de facilitateur dans les négociations avec le Hamas et son poids économique, notamment en tant que premier exportateur mondial de gaz naturel liquéfié, lui confèrent une place incontournable. Les frappes israéliennes risquent toutefois d’entraver cette capacité de médiation, tout en exposant Doha à des répercussions régionales.
En réaction à l’attaque, le Qatar a convoqué des réunions d’urgence avec ses partenaires énergétiques afin de prévenir toute perturbation de ses exportations de gaz, vitales pour l’équilibre du marché mondial. Les prix du pétrole ont d’ailleurs bondi dans la foulée des frappes, révélant la vulnérabilité des marchés face à l’instabilité géopolitique au Moyen-Orient.
L’opération israélienne à Doha marque un tournant. En ciblant un pays qui se voulait médiateur, Israël prend le risque de fragiliser les rares canaux de dialogue existants. Ce choix pourrait redéfinir les rapports de force dans la région, en poussant le Qatar à renforcer ses alliances régionales et internationales.
Pour Israël, il s’agit d’envoyer un signal fort au Hamas et à ses soutiens. Mais cette stratégie pourrait aussi se retourner contre lui en isolant davantage Tel-Aviv sur la scène diplomatique et en compliquant toute tentative de règlement du conflit.
